Forum Economique Breton 2024

JEAN-PIERRE VAUZANGES, PRÉSIDENT DES BAILLEURS SOCIAUX LA RANCE ET ESPACIL HABITAT, GROUPE ACTION LOGEMENT « AUGMENTER L’ACCÈS A L’EMPLOI PAR L’ACCÈS AU LOGEMENT »

Action Logement est un partenaire fidèle du FEB : pourquoi cet engagement dans un événement qui fédère une grande diversité d'acteurs économiques bretons ?
Les bailleurs sociaux du groupe Action Logement sont au service des territoires avec en priorité dans leurs objectifs le développement de logements pour les salariés des entreprises qui maillent ces territoires : augmenter l’accès à l’emploi par l’accès au logement ou encore faciliter la mobilité professionnelle. Le FEB est un événement dédié aux entreprises, il est normal que le Groupe Action Logement soit représenté par ses deux acteurs bretons, LA RANCE et ESPACIL.

Vous êtes un acteur de référence du logement social. Comment s’inscrit votre action dans l’ambition de transformation énergétique à horizon 2050 ?
Aujourd’hui, selon les données publiques, 7 millions de logements sont mal isolés et 14% des Français, tous segments du parc immobilier confondus peinent à se chauffer. 4,8 millions de logements sont qualifiés de passoires énergétiques, alors que la hausse des coûts de l’énergie vient renforcer cette problématique de départ. Si l’on ajoute à cela l’impact de l’énergie dans une autre dépense contrainte que sont les transports, la capacité des ménages à répondre à ce socle de dépenses énergétiques du quotidien devient de plus en plus limitée, notamment pour les locataires du parc social. Pour autant, sur la base des anciens DPE (renouvellement en cours suite à la loi Climat & Résilience), il n’y avait que 5% du parc social en étiquette énergie F ou G contre 25 à 30% dans le parc de logements global. Si l’on ajoute les étiquette E cela représente en revanche un peu plus de 20% du parc social, soit 1 million de logements. À l’autre extrémité du spectre, 37% du parc social sont aujourd’hui classés parmi le parc de logements le moins énergivore (étiquette A, B ou C), contre environ 14% de l’ensemble des résidences principales (donnée 2019).
Cette différence structurelle de performance entre le parc social et le parc privé est liée à 3 facteurs : d’abord, le parc social qui s’est massivement développé à l’après-guerre et son âge moyen est moins élevé que celui de l’ensemble du parc. Ensuite, la vigilance des bailleurs en général et d’Action Logement en particulier pour contenir les charges afin de solvabiliser les ménages aboutit à des investissements plus importants que le secteur privé pour le volet thermique. Cela permet aux bailleurs de se prémunir du risque d’impayé qui n’est bon pour personne. Plus qu’un enjeu environnemental, il s’agit donc là d’un enjeu social afin de conforter le reste à vivre des ménages et de contenir les charges de chauffage par la baisse des consommations. Enfin, la nécessité de garantir une efficience plus longue et de pérenniser l’attractivité commerciale du parc social eu égard à nos durées d’amortissement de 40 ans sur le bâti. 
Cependant, alors que le parc social est globalement moins énergivore, la précarité énergétique touche 26% des locataires du parc privé (1,5 million de ménages) mais 36% des locataires du parc social (1,54 millions de ménages) selon l’Observatoire National de la Précarité Énergétique (ONPE). Cet écart provient du niveau de ressources des locataires du parc social bien moindre que dans le parc privé ce qui expose plus fortement les premiers à la précarité énergétique. Cet écart justifie d’autant plus le fort investissement des bailleurs sur ces thématiques. 

Et sur un plan économique, dans son ancrage sur le territoire breton ?
Nous nous inscrivons dans un engagement national : le plan de relance. Un investissement de 500 M€ pour la rénovation du parc locatif social, qui s'ajoute au 2Mds€ destinés aux particuliers avec le dispositif « MaPrimeRénov ». 
Un des objectifs du groupe Action Logement est l’ambition environnementale : il est demandé que les filiales engagent 15% de leur production neuve en maîtrise d’ouvrage directe selon les standards du triennal 2025 – 2028 de la RE2020 (c’est-à-dire la seconde étape de la mise en œuvre de la RE2020) afin d’avoir dès à présent un retour d’expérience sur les modalités pratiques de cette réglementation et de son impact financier. L’objectif est aussi de rendre le parc construit aujourd’hui en phase avec les attentes de demain. Cependant, l’offre neuve n’est qu’une faible partie de la totalité du parc de logements. Si cette offre neuve est performante, (étiquette A ou B), elle appelle en complément une forte action sur le parc ancien. C’est ce qui définit le 2ème objectif du groupe : l’éradication des logements en étiquette E ou plus d’ici 2026 et l’engagement d’une démarche pour produire un bilan carbone consolidé du parc des filiales. C’est aussi ce qui justifie le fait que LA RANCE et ESPACIL HABITAT injectent ¼ de leurs investissements dans la rénovation et l’entretien du parc. Pour ce qui est de l’horizon 2050, l’objectif est d’atteindre en rénovation les étiquette A, B ou C.

 Est-ce que la transformation énergétique du logement social a un impact sur l’attractivité de la région, dans une perspective à la fois citoyenne et démographique ?
Globalement, la nouvelle réglementation présente un changement de paradigme : on passe d’une ère où l’on cherchait à réduire les consommations énergétiques à une recherche de décarbonation de l’ensemble de nos activités, dont le logement. C’est un prérequis pour atteindre la neutralité carbone. Quant à la question de savoir si ces efforts de transformation énergétique ont un impact sur l’attractivité du territoire, en tous cas ils y contribuent sans doute car cela va dans le sens des demandeurs de logements sociaux que de disposer de logements confortables et optimisés en matière de consommation énergétique.