Rachel Denis-Lucas, déléguée générale de Femmes de Bretagne, partage son parcours inspirant en tant que co-dirigeante de l’entreprise familiale Denis Matériaux et ses ambitions pour l'association.
Vous co-dirigez l’entreprise familiale Denis Matériaux depuis une vingtaine d’années, parlez-nous de votre parcours professionnel ? Après une école de commerce, j’ai travaillé trois ans en France dans une PME comme directrice d’un centre de profit, puis je suis partie à l’étranger au Japon puis 3 ans aux États-Unis pour cette société. Cela me plaisait, mais mes parents avaient une entreprise – Denis Matériaux – composée de 10 agences et 100 employés à l'époque. Même si je ne connaissais pas le milieu du bâtiment, je me suis dit que c’était une belle opportunité professionnelle et l’occasion de me rapprocher de mes parents. Au début, mon père ne souhaitait pas que je reprenne la société. Il avait peur que cela soit compliqué pour moi d’arriver dans ce milieu masculin dont je ne connaissais pas les codes.
Que souhaiteriez-vous partager comme conseil à des femmes qui sont aussi dans des secteurs plutôt masculins ? J’aimerais leur dire d’avoir confiance en elle. C’était mon cas. Malgré les difficultés, je n’ai pas douté, je me suis dit que cette adaptation était nécessaire. Je savais que j’étais capable. Donc ne doutez pas de vous-même. Ensuite je dirais qu’il faut se relever les manches et montrer ce qu’on est capable de faire.
Comment avez-vous rejoint Femmes de Bretagne ? J’ai eu beaucoup de chance dans mon parcours car j’ai fait une bonne école, j’ai travaillé dans de bonnes entreprises, avec de bons managers, j’ai pu faire des formations, et j’ai eu ma propre entreprise que j’ai dirigée pendant 22 ans. Je suis consciente que tout le monde n’a pas cette chance. Les femmes qui veulent se lancer dans l’entrepreneuriat – souvent après 45 ans - se découvrent souvent très isolées. Je trouve donc normal de redonner du temps à cette association qui met tous les outils à disposition des entrepreneures pour les aider.
Quelles sont vos ambitions avec Femmes de Bretagne ? Aujourd'hui nous comptons 1 500 adhérentes, mais notre couverture territoriale n'est pas encore homogène. Nous souhaitons améliorer cette couverture de proximité en Bretagne. Pour cela, nous cherchons à recruter des coordinatrices et à renforcer les services que nous proposons. Les femmes viennent chez Femmes de Bretagne pour chercher des compétences, du savoir-faire et du soutien en échangeant avec d'autres entrepreneures. Face à une forte demande, nous envisageons d'étendre notre maillage territorial et de doubler le nombre d'adhérentes. Cependant, pour cela, nous devons aussi étoffer notre équipe. Nous avons actuellement deux salariées, et il serait nécessaire d'en recruter une troisième.
Nous avons aussi mis en place un programme de mentorat, où des cheffes d'entreprises expérimentées partagent leur parcours avec les nouvelles entrepreneures. Nous souhaitons intensifier ce programme. Par ailleurs, nous avons développé un socle de compétences appelé les "Essentiels", un ensemble de formations recommandées pour les femmes cheffes d'entreprises, afin de leur fournir les bases nécessaires à leur réussite. <>
Comment s’est passée votre arrivée dans ce secteur masculin ? Pas très bien au début ! Je suis arrivée avec un triple handicap : j’étais une femme, fille du patron et je ne connaissais pas le secteur. En plus, il n’y avait pas de poste pour moi quand j’ai commencé. J’ai donc pris tous les postes qui n’étaient pas pourvus. Je me suis chargée de l’informatique, des ressources humaines, de la sécurité, du marketing… J’ai réussi à faire ma place comme ça.
Qu’attendez-vous du FEB ? Nous avons deux vitrines principales pour mettre en avant les actions de Femmes de Bretagne lors du FEB. La vitrine "180 secondes pour convaincre" : Nous participons à la sélection, dans le but de rendre visible une partie de l’économie bretonne souvent méconnue. Actuellement, 36 % des entreprises bretonnes sont dirigées par des femmes contre 30 % au niveau national, soit 6 points d'avance. Nous souhaitons mettre cela en lumière, qu’il s’agisse de grandes entreprises ou de plus petites structures. La vitrine "Parité et bonheur en entreprise" : Nous aborderons le sujet de la parité dans les fonctions traditionnellement masculines et partagerons nos expériences. L’objectif est de montrer que la parité est une source de performance et peut transformer les entreprises. La route vers la parité est encore longue, car elle nécessite un changement des mentalités, mais c’est un enjeu essentiel. À titre d'exemple, en arrivant dans l’entreprise familiale, j’ai embauché de nombreuses femmes, même dans le secteur du bâtiment, ce qui a apporté un certain équilibre.