L’innovation technologique et notamment l’intelligence artificielle générative va progressivement métamorphoser nos modes de travail et les processus internes pour devenir une composante clé de l’attractivité des entreprises et des collaborateurs. Rencontre avec Nicolas Sebbah, Managing Director de l’activité Data & IA chez Niji.
Si vous deviez parler de l’IA devant la communauté économique, universitaire, associative bretonne, que diriez-vous en premier ?
Je dirais que c’est sûrement une transformation majeure qui est en train d’arriver. De la même manière qu’on a connu la transformation digitale il y a une vingtaine d’années, nous allons sûrement vivre une transformation de cette ampleur et peut être encore plus forte dans les prochaines années autour de l’IA – et plus particulièrement de l’IA générative.
Tous les ans, nous faisons un benchmark de la maturité digitale des entreprises. Nous nous questionnons sur comment les entreprises s’emparent, organisent, structurent et s’auto-évaluent sur leur maturité digitale. En mars 2023, nous avons posé la question de l’enjeu de l’IA : seulement 10 % des répondants (composés d’entreprises du CAC 40) jugeaient l’IA stratégique dans leur entreprise à ce moment. Ce n’était pas encore un sujet. Nous avons lancé ce même benchmark aujourd’hui, et le sujet de la data et de l’IA ressort à 80 %. C’est devenu un enjeu majeur en moins d’un an. Il y a eu un énorme travail d’appropriation et d’acculturation autour de l’IA, que ce soit l’IA classique (comme le machine learning qui existe depuis des dizaines d’années) ou l’IA générative qui a émergée récemment avec Chat GPT.
Quelle différence entre l’IA classique et l’IA générative ?
L’IA générative comprend toutes les IA. Son mode de fonctionnement va permettre de générer une réponse d’elle-même, que ce soit du texte, une image, du son, une infographie. Elle propose une réponse sur la base de tous les éléments qu’on lui a donné en amont. Alors que dans un modèle d’IA classique, on l’entraine en permanence pour arriver à un niveau de fiabilité qui corresponde exactement à ce que vous voulez avoir. Avec un modèle d’IA générative, vous ne maitrisez pas la réponse.
Autre élément de différence entre ces 2 IA : historiquement, l’IA classique était entre les mains d’experts. C’était l’apanage d’un petit nombre de spécialistes bien formés dans des entreprises et les laboratoires. Il y a 18 mois, vous et moi étions incapables de manipuler de l’IA, Aujourd’hui, l’interface de Chat GPT pour ne citer qu’une seule plateforme, la plus connue, permet à n’importe quelle personne qui sait chatter ou bien écrire un prompt d’utiliser l’IA. Cela démocratise l’utilisation de ces modèles et de la puissance associée. Il peut y avoir autant d’usages que de personnes qui se connectent. Un champ des possibles s’est ouvert ces douze derniers mois !
Ce champ des possibles a quand même des limites ?
Certainement ! La première limite, c’est sans aucun doute l’hallucination. L’IA peut se tromper et il est difficile de maitriser la réponse. Le modèle ne donne pas forcément une réponse satisfaisante, donc il faut optimiser et l’entrainer. Il faut réduire ce taux d’hallucination - qu’on pourrait traduire par taux d’erreur – pour pouvoir intégrer l’IA dans des processus plus critique des entreprises.
On peut aussi lister d’autres limites comme le prix, la maîtrise des coûts, l’impact carbone, la sécurité et fiabilité des documents qu’on va intégrer. Mais vue la rapidité d’amélioration de ces nouveaux modèles, on devrait vite identifier des réponses à ces limites.
Concrètement, en quoi l’IA est-elle une composante clé de l’attractivité selon vous ?
Dans le domaine de l’emploi, grâce à l’IA générative, nous sommes capables d’aller plus vite. On ne part plus d’une page blanche. L’IA propose une base sur laquelle travailler et se construire. Dans une expérience d’évolution des collaborateurs, entre junior et senior, les rapports vont aussi évoluer. Le temps des tâches laborieuses faites par les jeunes se restreint, l’agilité des collaborateurs augmente. Il faut toutefois comprendre ses limites (c’est une base de travail, il faut repasser dessus) mais fondamentalement ça augmente la productivité et performance.
Il y a aussi la dimension de l’attractivité des entreprises…
Tout à fait. Ici c’est la vitesse à laquelle les entreprises vont s’approprier ces enjeux pour les industrialiser qui est cruciale. Les entreprises qui vont prendre des risques et innover vont être plus attractives pour les salariés, pour les clients et pour les partenaires car elles vont enrichir, augmenter leur attractivité.
Quand on parle d’IA on pense aussi à ce que l’innovation peut apporter dans la transition environnementale…
Un des enjeux majeurs est la maîtrise des impacts carbone de tous ces IA. Des acteurs réfléchissent déjà à comment réduire l’impact environnemental de ces modèles. Nous ne sommes qu’au début de l’analyse et de la réflexion. L’enjeu de l’environnement est posé, mêmes si toutes les solutions ne sont pas encore trouvées. C’est à nous de les imaginer aujourd’hui. Chez Niji, nous faisons beaucoup de projet d’éco conception et dans toutes les chartes IA, les notions de responsabilité environnementale sont au cœur des engagements.