Forum Economique Breton 2024

FRANCK PERRIN MOREL, PRESIDENT DU MEDEF COTES D’ARMOR
"Concilier croissance et sobriété nécessitera d’investir dans l'économie numérique, où la Bretagne fait figure de région leader"

Franck Perrin Morel, Président du MEDEF Côtes d’Armor.
Les limites de la planète nous imposent de recourir à une croissance plus sobre en ressources, notamment énergétiques, foncières, aqueuses, et minérales. Et ce après plus de 160 années de recours sans limites aux énergies fossiles fortement émettrices de gaz à effet de serre. Notre atmosphère contient 2 300 milliards de tonnes de CO2 et nous devrons veiller à ne pas dépasser 3 000 milliards de tonnes d’ici 2050 si nous ne voulons pas dépasser 1,5 à 2° C de hausse des températures, sachant que nous émettons actuellement 40 milliards de tonnes/an. Il ne nous reste ainsi que 17 années d’émission au rythme actuel ! 

Même si la France ne contribue qu’à un 1 % des émissions mondiales, elle s’est dotée d’une stratégie nationale bas carbone très ambitieuse de baisse de ses émissions. Cette stratégie repose sur deux grands axes : 

• Réduire d’ici à 2050 sa consommation énergétique en passant d’une consommation nationale de 1 600 TWH en 2023 à seulement 930 en 2050 ! 
• Substituer aux énergies carbonées (pétrole, charbon, gaz) des énergies décarbonées (nucléaire, éolien, photovoltaïque, méthanisation, …). 

L’immense défi qui se posera aux pouvoirs publics, aux entreprises, aux citoyens, sera de conjuguer croissance et réduction du recours à l’énergie. Sera-ce réellement possible ? Cette question est fondamentale car la croissance de l’économie est absolument nécessaire à la stabilité institutionnelle, démocratique, sociale, d’un pays. Sans croissance, un pays, sa population, s’égarent dans la frustration, le désespoir, la dégradation économique et sociale avec tous les risques démocratiques et institutionnels inhérents à ce type de situation. 

"Concilier croissance et sobriété nécessitera d’investir très fortement dans l' économie numérique"

La croissance, qui repose sur des gains de productivité, est consubstantielle à l’intelligence humaine. En effet, c’est parce que l’homme est doué de capacité d’adaptation, de créativité, d’ingéniosité, qu’il ne cesse d’améliorer ses méthodes de production. En d’autres termes, brider la croissance, la contraindre, revient à nier ce que nous sommes au plus profond de nous-même. Dès lors, la question de fond est de savoir comment, compte tenu de cette inclination naturelle de l’homme, inscrire cette croissance dans un impératif de sobriété ? 

La question de fond est celle de la valeur ajoutée. Dans quels secteurs d’activité nos sociétés créeront-elles de la valeur ajoutée ? L’industrie demeurera, certes sous des formes peut-être différentes, mais elle demeurera, ne serait-ce que pour produire ce dont l’humanité aura besoin. Mais ses process de production seront beaucoup plus sobres. Il s’agira de produire, souvent plus, mais avec moins de ressources et moins d’émissions. Sans doute faut-il espérer des gains de productivité, de fortes croissances, via l’économie plus immatérielle, comme l’économie numérique, l’intelligence artificielle, etc. Dès lors, concilier croissance et sobriété nécessitera d’investir très fortement dans toute cette économie numérique, toute cette économie de l’IA, où la Bretagne fait figure de région leader en France et en Europe.