Vous êtes depuis quelques semaines le nouveau président du Crédit Mutuel Arkéa, succédant ainsi à Jean-Pierre Denis. Quel est votre parcours ?
J’ai 50 ans, et un parcours professionnel diversifié, dans la fonction publique (à l’Elysée), dans la banque (chez BNPParibas et les Caisses d’Epargne), l’assurance (Scor)… Depuis 7 ans, j’exerçais au sein du groupe immobilier Nexity. J’en ai été le directeur général délégué, avec un rôle très large, et dans l'accompagnement d'une stratégie marquée - comme celle d'Arkéa - par l'accompagnement des transitions. C’est là que Jean-Pierre Denis est venu me proposer de lui succéder à la tête du Crédit Mutuel Arkéa. Pour moi qui suis originaire de Lannion, cela me permet aussi de renouer avec mes racines bretonnes ! Mais Le Crédit Mutuel Arkéa n’est pas que breton, il comprend également la fédération du Sud-ouest, les filiales nationales…
Le siège, toutefois, est à Brest !
C’est vrai, nous sommes avant tout un groupe territorial, assis sur deux régions, mais très ancré en Bretagne avec le CMB. Notre objectif est d’être la première banque de Bretagne par la présence sur le terrain et le taux de satisfaction clients. Nous servons 5 millions de clients, dont près de 2 millions au CMB, qui accompagne donc deux Bretons sur trois ! Enfin, nous sommes un groupe coopératif et mutualiste, détenu par ses clients sociétaires, ce qui permet d’entretenir un lien fort et singulier avec eux.
Où en est le dossier d’indépendance défendu par vos prédécesseurs ?
Nous posons comme objectif d’être un groupe autonome. Nous le sommes aujourd’hui, à travers la maîtrise de tous les métiers que nous souhaitons exercer. Nous disposons ainsi de notre propre outil informatique, ce qui est un facteur de performance. Le signe de notre autonomie, c’est cet ancrage territorial dont je parlais à l’instant, avec 11.000 emplois, dont 3.000 à Brest. L’indépendance, c’est un projet que nous confirmons. Les discussions avec les autorités de tutelle françaises et européennes avaient été mises en pause lors de la crise sanitaire. Elles vont reprendre prochainement. Nous sommes convaincus que rester au sein du groupe Crédit Mutuel risque d’entrainer notre dilution dans un grand ensemble national, très centralisé, et serait à l’opposé de ce que nous souhaitons faire. Je le dis dans un esprit d’apaisement, mais avec détermination.
Le groupe se présente comme un acteur financier à impact positif. Qu’entendez-vous par là ?
Simplement que nous voulons être utiles au monde qui nous entoure. Une entreprise qui perd de vue cet objectif ne sera pas durable. C’est à la fois moderne et récent, mais aussi ancré au cœur de nos valeurs coopératives. Concrètement, nous voulons donner du sens à l’argent qui nous est confié par nos clients. Cela concerne l’épargne bancaire, la collecte des dépôts, l’assurance vie, également notre politique d’investissement. Ainsi, nous n’aurons plus aucune opération liée au charbon dans nos comptes à l’horizon 2027. Nous souhaitons également nous doter d’indicateurs de performance extra-financière pour mesurer nos actions, cela doit être une boussole pour l’ensemble de nos activités.
Le FEB s’intéresse à la relance en Bretagne et à ses modalités, en lien avec les indispensables transitions. Comment y contribuez-vous ?
Nous mettons toute notre énergie dans l’accompagnement des transitions en Bretagne. Nous savons qu’elles prennent du temps. Selon les secteurs, nous avons entre 5 et vingt à trente ans pour inventer de nouveaux modèles. Notre rôle est d’y contribuer, notamment dans le secteur agricole, qui est un sujet essentiel pour la Bretagne. Nous avons la chance de compter de nombreux agriculteurs et de professionnels de l’agroalimentaire parmi nos sociétaires, qui nous éclairent sur ces enjeux. Nous soutenons des stratégies de filières, à la fois sur les forces traditionnelles de l’économie bretonne, et sur de nouveaux secteurs. Les services à forte intensité financière, le numérique sont des axes de croissance majeurs pour la région.
Vous serez cette année encore très présents au FEB. Qu’allez-vous y présenter ?
Nous allons mettre en valeur notre capacité d’investissement en fonds propres. Ce sont 1,1 milliard d’euros investis au total en France, dont plus d’un tiers en Bretagne. Nous sommes l’acteur financier le plus actif de ce point de vue. Et nous sommes capables de faire encore davantage, sans perdre de vue cette vision de terrain qui nous caractérise. Nous avons également un rôle à jouer auprès des acteurs institutionnels et des collectivités locales. Toutes les banques ne le font pas. Mais nous sommes convaincus qu’il s’agit d’une clientèle essentielle. Nous devons être à leur écoute, à un moment où les ressources financières des collectivités sont tendues, pour inventer de nouveaux modèles financiers, en nous appuyant sur la très forte coopération intercommunale existant en Bretagne, qui est une chance. C’est pourquoi j’appelle de mes vœux l’avènement d’une nouvelle économie mixte, associant acteurs économiques publics et privés au service des projets de territoire.
Propos recueillis par Xavier Debontride