Forum Economique Breton 2024

Acceptabilité et communication d’influence QUELS LEVIERS ACTIONNER POUR ETRE AUDIBLE ET IMPACTANT AUJOURD'HUI ?

 Dounia Alno /  Audrey Trotereau
La 5 G, les véhicules électriques, les éoliennes�� La liste des innovations dont le déploiement est sensible n’en finit plus de s’allonger. Ces changements sociétaux de fond sont souvent étroitement portés par des entreprises qui ont leur intérêt en jeu sur la question. La communication d’influence est un des leviers qui permet de rendre ces transformations plus acceptables par les citoyens et l’opinion publique.

Chaque sujet de société - ou d’entreprise - quel qu’il soit, a ses promoteurs et ses détracteurs. Dans un monde où il va falloir « accepter » de plus en plus (des compromis, des changements de paradigme, des efforts plus importants et autres désillusions), comment identifier les forces en présence et convaincre les promoteurs à être plus “vocaux” et les détracteurs à passer (légitimement) dans le camp des avocats ? C’est la question que se sont posée Dounia Alno, directrice de la communication de la Rennes School of Business et Audrey Trotereau, directrice de la communication d’Arkéa, deux entreprises partenaires du Forum Économique Breton.

Les éoliennes et leur acceptabilité par la société sont sûrement le premier exemple qui vient en tête. « C’est une innovation vertueuse, écologique… tout le monde y souscrit par principe. Mais dès que ces éoliennes viennent envahir la vue que vous avez de votre jardin, d’un seul coup cela devient plus compliqué », explique Dounia Alno. Pour Audrey Trotereau, cela s’applique aussi au milieu bancaire : « Le banquier va souscrire au fait que les processus d’investissement et de financement soient plus vertueux et aient un impact environnemental et social, mais si ça impacte la performance financière, il peut y avoir des réticences », précise-t-elle.

Pour arriver à atteindre le pallier d’acceptabilité, trois leviers d’influence peuvent alors être utilisés :

1) L’écoute et le dialogue 
C’est un levier évident mais indispensable à l’adhésion à la transformation : il faut associer à la stratégie de changement les personnes touchées par celui-ci. Pour cela, il faut ouvrir et maintenir le dialogue tout au long du processus, instaurer une écoute permanente, bienveillante et authentique. « La voix qui apporte le changement doit être vraie, le propos ne doit pas être maquillé, pas de communication cosmétique », indique Audrey Trotereau. Pour cela les entreprises peuvent notamment s’appuyer sur les débats publics et les tables rondes ou encore sur les ateliers d’intelligence collective. « Si une personne n’est pas à l’origine d’une initiative, elle n’y souscrira pas et y adhérera plus difficilement, d’où l’intérêt de la co-construction dès le début d’un projet. Chez Arkea, nous avons misé depuis quelques années sur les méthodes d'intelligence collective avec un certain nombre de collaborateurs qui sont formés pour mobiliser un grand nombre de parties prenantes, que ce soient des salariés, des administrateurs mais aussi des clients sur des réflexions d'entreprise, et ce sur des grands enjeux », précise la directrice de la communication d’Arkea.

2) Apporter des éclairages objectifs 
Un autre levier consiste en l’apport d’éléments objectifs pour appréhender le projet dans sa globalité. « Il faut transformer des données objectives en données positives », expliquent d’une même voix les deux communicantes. Une méthode déjà mise en place chez Arkea et qui permet d’apporter un éclairage clair au débat. Pour Dounia Alno de la Rennes School of Business, l’idée est tout simplement de prendre ce qui est un élément de blocage pour inspirer. « Par exemple sur les éoliennes, au-delà de l’aspect esthétique, c’est le coût qui parfois bloque. À ce moment on va expliquer que 1 euro dépensé pour ces infrastructures égal tant de CO2 économisé, ou tant d’emplois créés. On se base sur du rationnel pour convertir un point bloquant en avantage positif et en bénéfice », développe-t-elle. Un système qui peut se décliner très facilement et sur lequel on peut très vite communiquer.

3) Influencer les influenceurs 
Le dernier pilier repose sur la constitution d’un réseau d’alliés composé de leaders d’opinion (journalistes, politiques, intellectuels, scientifiques, associations, agences, activistes…) qui va s’exprimer via les médias traditionnels ou médias sociaux pour communiquer la raison d’être et la légitimité du projet. Le but pour une entreprise est de convaincre et travailler avec ces influenceurs majeurs pour toucher l'opinion et donc favoriser l’acceptation d’un projet. C’est aussi l’occasion de montrer qu’on a conscience que ce sujet peut créer controverse et nécessite d’être traité et expliqué par quelqu’un d’extérieur et de « neutre ». On peut prendre comme exemple Emmanuel Macron qui a choisi de faire une émission avec les Youtubers McFly et Carlito en 2021. Une stratégie de communication qui visait à attirer le jeune électorat pour l’élection Présidentielle 2022.

Avec ce triptyque en main – écoute et dialogue, éléments objectifs et appui sur un réseau de leaders d’opinion – une entreprise augmente drastiquement ses chances de faisabilité d’un projet sensible ou en tout cas soumis à l’opinion de la société civile.